Si les femmes vivent plus longtemps que les hommes, ce serait grâce à leur génome, ou plus précisément à l’ADN mitochondrial. Une expérience menée sur des drosophiles quasiment identiques génétiquement met en avant l’importance de nombreuses mutations sur l’espérance de vie et le vieillissement des mâles, alors qu'elles sont sans effet sur les femelles.
Les femmes vivent 6 ans de plus que les hommes. On justifie cette différence par des comportements plus risqués des hommes durant leur vie, la testostérone (hormone mâle) étant en plus accusée d’avoir des effets négatifs sur la santé alors que les œstrogènes seraient protecteurs.
Des scientifiques de la Monash University (Melbourne, Australie) pensent cependant que cet écart s’explique aussi par la génétique, à cause de mutations retrouvées dans l’ADN mitochondrial. Du moins, c’est le cas chez les mouches drosophiles comme ils le montrent dans Current Biology. Ils suggèrent aussi que ce mécanisme pourrait se transposer à l’espècehumaine.
L’ADN mitochondrial, source de vieillesse chez le mâle
Dans leur expérience, les chercheurs australiens ont conçu des mouches quasiment identiques, presque des clones. Elles portaient toutes le même patrimoine génétique nucléaire (avec un chromosome sexuel en moins pour les mâles). La seule différence résidait dans l'ADN de leurs mitochondries, issu de treize populations de drosophiles différentes.
La drosophile est un modèle de choix en biologie. Ces insectes de laboratoire, vivant dans un milieu contrôlé, ne sécrètent pas de testostérone et ne conduisent pas à toute vitesse sans leur ceinture de sécurité. Ils constituent un bon point de départ pour étudier les aspects génétiques du vieillissement et de l'espérance de vie. © Marcos Freitas, Flickr, cc by nc 2.0
La durée de vie de chacune de ces souches a été relevée. De manière surprenante, les biologistes ont constaté une très grande variabilité dans l’espérance de vie et la vitesse de vieillissement des mâles en fonction de leur patrimoine génétique mitochondrial. En revanche, les femelles ne semblaient que très peu affectées. C’est la preuve que des mutations dans l’ADN des mitochondries conditionnent la longévité des mâles.
Cette découverte est très intéressante. La sélection naturelle fonctionne sur le principe qu’un gène délétère ou nocif s’élimine de lui-même de la population au fil des générations. Ici, les auteurs mettent en évidence la possibilité qu'un gène qui serait néfaste aux mâles mais pas aux femelles puisse subsister au sein de la population. Une façon de contourner les règles de l’évolution...
Une réponse sur la longévité des femelles, de nouvelles questions
Certaines questions demeurent tout de même. Première interrogation : pourquoi ces mutations dans l’ADN mitochondrial affectent-elles la survie et le vieillissement des mâles tout en épargnant les femelles ? Celles-ci disposent-elles d’une protection dont les mâles ne bénéficient pas ? Pour le moment, nous ne disposons d’aucun élément de réponse.
Ensuite, ce principe peut-il s’appliquer à l’espèce humaine ? Là encore, aucune expérience ne l’a démontré et il est impossible de conclure. Cependant, les auteurs supposent que c’est le cas, l’ADN mitochondrial se transmettant selon le même principe pour toutes les espèces animales. Pourquoi l’Homme ferait-il exception ?
Dernier point : ce processus est-il inéluctable ? Cette recherche s’est intéressée à des individus identiques pour montrer l’impact du génome mitochondrial sur l’espérance de vie. Mais à l’échelle de la population, la variabilité génétique est source de richesse. Il faudrait maintenant déterminer si l’ADN nucléaire ne peut pas interférer positivement avec ces mutations et protéger les mâles.
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